Dissidences, n° 4. Mai 68 : monde de la culture et acteurs sociaux dans la contestation

En France, 40 ans après Mai 68 on continue de s'interroger sur ce moment de «fièvre hexagonale». La soudaineté des événements et leur ampleur a surpris tous les observateurs. À l'occasion de chaque commémoration décennale, journalistes, historiens et sociologues ont tenté de donner leur explication, exaltant ou diabolisant ces «événements». Certains, dont la voix fut dominante dans la dernière période, pensent que Mai 68 est à l'origine de la plupart des maux de notre société. Des hommes politiques pressés, de droite en général, reprennent cette antienne, accusant Mai 68, pêle-mêle, de la montée des incivilités, de la perte des repères, du manque de respect envers les anciens... Il ne s'agit pas pour nous «d'en rire», ni «d'en pleurer», mais plus modestement d'éclairer certains aspects de Mai 68 encore mal connus, d'avancer dans la compréhension de ces mouvements, et pour certains d'y trouver des raisons d'espérer en une réforme de la société. Nous avons tendance à penser que non seulement l'héritage de Mai 68 est possible, mais que ce moment est resté impérissable ! En refusant à la fois la société de consommation, le capitalisme et le socialisme d'État, les soixante-huitards ont tenté de dire qu'un autre monde était possible. En redonnant voix aux sans voix, en permettant aux travailleurs et aux habitants de se parler, de se redécouvrir, Mai 68 a contribué à créer du lien social. Certes le mouvement a eu ses failles où se sont engouffrés les tenants de l'ordre établi un moment désarçonnés. Mais la défaite des soixante-huitards ne fut que momentanée, beaucoup de leurs idées demeurant à la base des principaux aspects de notre modernité.