Mes carnets de bord : sept ans-onze navires, 1953-1960

Mes carnets de bord

21 h 00 : nous croisons maintenant devant Penarth, le Pier et la Marina s'illuminent. Des promeneurs accoudés à la balustrade agitent leur foulard. Plus loin, nous croisons devant Barry Island et débarquons le pilote. « Amusement Park » déverse des flots de lumière dont les reflets folâtrent sur la mer belle, pendant que la nuit tombe tout doucement. Tout à fait sur notre gauche, derrière la swimming pool, maintenant déserte, une enseigne lumineuse dessine en bleu les lettres du « Bindles », noble et modeste flot d'azur vers lequel convergeaient mes coups de téléphone pour réserver une table et d'où je m'entendais souvent répondre « sorry, full up » (désolé, complet)... Bientôt, tout s'estompe derrière nous, dans les brumes du couchant qui s'attarde à l'horizon.

Qu'emportons-nous vers Dakar ou Conakry, en plus des tonnes de briquettes ? Un panier de fleurs, une image, des images ? Que laisse-t-on sur le quai ? Des wagons vides, des ouvriers sans travail ? Des perles de rosée ? En fait, le mot « marin » est éternellement lié aux mots « départ », « arrivée » ou « retour ». Quel que soit, aujourd'hui ou demain, le sens que l'on donne à ces termes, ils contiennent toujours d'intenses émotions.

Cap au sud vers Dakar. L'océan est tout bleu. Une légère houle nous berce. Je reprends mes tâches de routine, comme après chaque appareillage ; d'abord la lessive. Cette fois-ci, j'en ai un grand panier. Ensuite, mes petits carnets de bord.