Raisons politiques, n° 89. Positionnalités des chercheur.e.s minoritaires : connaître les mondes sociaux, entre rapports de pouvoir et mythe de l'objectivité

Positionnalités des chercheur e s minoritaires

Connaître les mondes sociaux, entre rapports de pouvoir et mythe de l'objectivité

Pour rendre compte de la réalité et l'expliquer, les procédures de production de connaissances des sciences sociales s'appuieraient sur un idéal d'objectivité et de neutralité censé en garantir leur scientificité. Cette fausse évidence interroge en creux les conditions d'accès au savoir pour un sujet nécessairement déterminé, pris dans les rets d'un monde social dont l'épaisseur et la complexité sont faites d'historicité et de relations, donc traversé de tensions et de conflits. « Peut-on avoir accès à la vérité sans mettre en jeu l'être même du sujet qui y accède ? », demandait Michel Foucault. C'est cette vigilance à l'égard de l'articulation entre savoir et sujet qui se trouve ici déplacée dans le champ des sciences sociales, en plaçant la focale sur la position des chercheur·e·s minorisé·e·s sur la base des rapports de genre et/ou de race. Ce numéro invite ainsi à questionner la concrétude de la norme abstraite du « savant », l'idéal d'un sujet homogène et universel du savoir, et par là à penser les effets épistémiques, éthiques, sociaux et politiques de la matérialité du pouvoir dans la production et l'organisation du savoir. Aborder les conditions épistémologiques et politiques de fonctionnement du monde savant permet en effet de mieux en questionner les conditions de démocratisation.